Le plus dur reste à faire

 

La branche BTP a entamé la rédaction des référentiels pénibilité. Six mois de travail intensif l’attendent pour appliquer le compte pénibilité dès le 1er juillet.

Le compte à rebours a commencé. Le 18 décembre 2015, une première réunion de travail des unions de métiers du gros œuvre initiait la rédaction des référentiels pénibilité de la branche BTP. Ces référentiels sont issus de la simplification du compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P), actée par deux décrets publiés le 31 décembre dernier. Ces textes confirment la suppression de la fiche individuelle d’exposition à la pénibilité, prévue dans la première mouture du dispositif. Elle visait à obliger l’employeur à évaluer lui-même l’exposition de chaque salarié aux dix critères d’exposition à la pénibilité – dont six concernent le BTP – définis par les pouvoirs publics (voir tableau, page 14). Face à la grogne des organisations patronales contre ce qu’ils considéraient être une « usine à gaz », les pouvoirs publics leur ont ouvert la possibilité de réaliser elles-mêmes des référentiels pénibilité qui identifieront quels postes, quels métiers ou quelles situations de travail sont exposés à des facteurs de pénibilité. Chaque employeur pourra ainsi utiliser ces référentiels pénibilité qui identifieront quels postes, quels métiers ou quelles situations de travail sont exposés à des facteurs de pénibilité. Chaque employeur pourra ainsi utiliser ces référentiels "maison", à partir de leur entrée en vigueur prévue pour le 1er juillet 2016 (le ministère du Travail n'envisage pas de repousser cette date butoir), pour déclarer l'exposition à la pénibilité de ses salariés.

Le patronat planche.

Deux possibilités s’offraient aux branches pour réaliser ces référentiels : soit patronat et représentants des salariés tombaient d’accord sur une version du référentiel, auquel cas l’Etat se contentait de prendre acte de leur décision ; soit les organisations patronales représentatives planchaient sur le sujet et faisaient une proposition aux pouvoirs publics, lesquels pouvaient ensuite homologuer ou non les référentiels tels quels, après avis du Conseil d’orientation des conditions de travail, instance paritaire. C’est pour l’instant cette deuxième solution qui a été privilégiée par le BTP, avec l’Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP), autre institution paritaire, à la manœuvre. « Le travail de rédaction du référentiel a débuté à la Capeb, les Scop, l’OPPBTP et nous-mêmes, explique-t-on du côté de la Fédération Française du Bâtiment. Le travail devrait être bouclé au 1er juillet. » « L’objectif de nos travaux est de permettre aux entreprises d’éviter la traçabilité individuelle, salarié par salarié, et de passer à une logique plus collective par famille d’emplois », avance pour sa part Jean Cerutti, président de la commission des relations du travail et de la protection sociale de la Fédération nationale des travaux publics. « C’est un sujet complexe où il va falloir faire preuve de réalisme et de pragmatisme, estime de son côté Olivier Diard, délégué général de la Fédération nationale des Scop du BTP. Car il faut que ce dispositif reste viable économiquement. Il s’agit de ne pas gêner les entreprises, sans pour autant aller à l’encontre des intérêts de nos salariés. Nous adoptons un regard d’experts, de professionnels de la branche. »

Un compte pénibilité « simplifié ». Vraiment ?

La rédaction de ces référentiels, destinés à simplifier la vie des employeurs, représente donc un énorme travail. Il est probable que le document final se présente sous la forme d’un authentique « pavé ». D’où le souhait de l’OPPBTP de faire preuve de pédagogie et de développer des outils permettant une mise en œuvre facile de ce « pavé » pour les employeurs du BTP. Uniquement pour le secteur des travaux publics, on dénombre au moins une centaine de fiche de poste…
Autre souci pointé par les organisations professionnelles : la complexité de la définition de certains seuils, notamment pour le risque chimique. « Ces textes sont incompréhensibles pour le chef d’entreprise que je suis !, tonne Jean Cerutti. C’est une difficulté majeure pour réaliser notre référentiel pénibilité, car nous ne pouvons poursuivre sans comprendre et sans savoir comment prendre en compte ces seuils d’exposition chimique dans notre document. »

L’employeur peut se passer des référentiels.

Quoi qu’il en soit, il faut rappeler que les employeurs ne seront pas tenus d’utiliser les référentiels. « A partir du moment où les branches professionnelles auront mis à disposition des référentiels pénibilité, chaque entreprise aura le choix de les utiliser ou non, explique Clarisse Petit, consultante prévention des risques professionnels au cabinet d’audit Atequacy. Si elle les utilise, dans la mesure où ces référentiels seront reconnus par les pouvoirs publics, elle bénéficiera d’une couverture juridique  en cas de litige avec un salarié. C’est ce dernier qui aura la charge de la preuve. En revanche, si l’entreprise décide d’évaluer elle-même l’exposition de chacun de ses salariés à la pénibilité, elle aura la charge de la preuve en cas de contentieux. »

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29/01/2016