70 ans de l'OPPBTP : la profession planche en faveur de la sécurité
 
Des professionnels de la construction, réunis le 12 octobre à l’occasion de la célébration des 70 ans de l’Organisation professionnelle de prévention du BTP (OPPBTP), ont débattu des solutions pour faire progresser la santé et la sécurité au travail. L’organisme a également décerné les trophées des Victoires de la prévention.
 
 
« La survenance d’un accident du travail n’est jamais banale : c’est sans doute dans une carrière, pour beaucoup d’entre nous, le seul moment où l’on songe à changer de métier », assène Jacques Chanut, président de la FFB. «Même si les chiffres s’améliorent, nous devons considérer qu’un accident n’est jamais une fatalité. » 
 
Conviés par  l’Organisation professionnelle de prévention du BTP (OPPBTP) pour fêter ses 70 ans d’existence, des chefs d’entreprise et des responsables syndicaux et patronaux du secteur ont échangé, le 12 octobre, autour de pistes pour faire avancer la sécurité. L’OPPBTP en a profité pour dévoiler les noms des entreprises lauréates des Trophées de la prévention (voir encadré).
 
 
 
« La prévention constitue aussi un investissement »
 
« Depuis la création de l’OPPBTP, en 1947, le taux d’accidents mortels a chuté de 79% (1), le taux d’accidents avec arrêt ayant quant à lui diminué de 55,8% », se félicite Alain Rébé, son président. « Et les dernières statistiques de la Cnam-TS nous encouragent. » Le taux de fréquence des accidents du travail dans le BTP a en effet baissé de 3,7 % en 2016. Mais Alain Rebé n’en reconnaît pas moins l’ampleur de la tâche qui reste à accomplir. Il assigne ainsi au secteur plusieurs objectifs : faire baisser le taux des accidents graves et mortels, et améliorer les conditions de travail, afin de rendre les métiers du BTP plus attractifs. Chaque participant à l’évènement anniversaire y est ainsi allé de sa proposition de solution. L’occasion également, pour ces représentants de la profession, de soulever des interrogations, et de mettre en lumière des points de vigilance.
 
Serge Plechot, secrétaire général de la CGT Construction, rappelle d’ailleurs que les entreprises ont tout à gagner à agir sur le registre de la sécurité. « La prévention représente un coût, mais c’est aussi un investissement : des salariés qui travaillent avec des équipements de protection individuelle, du matériel adapté et renouvelé, adapté au chantier, seront aussi plus productifs ! » Le responsable syndical attire en outre l’attention sur l’intensification du travail liée aux délais raccourcis impartis pour réaliser les chantiers. « Cela pose la question du contrôle, à tous les niveaux, de ce que porte le manager en matière de sécurité auprès des salariés sur le terrain. »
 
Pour Jacques Petey, président de la Fédération des SCOP du BTP, il n’est désormais plus question de dissocier la prévention de la responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE), « qui concerne notamment les conditions de travail». Il mise, pour faire progresser la sécurité, sur l’introduction de la norme ISO 26 000 dans les marchés publics. « Les maîtres d’ouvrage doivent s’en emparer. »
 
 
 
Le document unique, « colonne vertébrale de la prévention »
 
Gérard Duez, président de la CFE CGC BTP souhaite pour sa part tempérer les ardeurs générées par la maquette numérique. « Le BIM (Building information modeling) améliore les relations entre le bureau d’études et le chantier, et peut ainsi générer un gain de productivité. Il peut par contre aussi entraîner des dérives au niveau de la sécurité. » Un point à surveiller pour Gérard Duez, qui entend ainsi souligner que « derrière cette révolution technologique, il y a des personnes ». 
 
 « L’un des objectifs du Plan horizon 2020 de l’OPPBTP est de parvenir à 100% de document unique d’évaluation des risque professionnels dans les entreprises : si nous y parvenons, nous aurons fait œuvre utile ! » reprend  de son côté Jacques Chanut. Ce n’est pas Domitille Decottegnie, responsable QSE de l’entreprise Decottegnie (43 salariés), qui le contredira.  « Cet outil constitue la colonne vertébrale de notre politique prévention : il a des effets sur l’organisation, la planification…  Nous en avons fait un projet collectif. »
 
 
 
Améliorer la prévention sur les critères de pénibilité sortis du compte « à points »
 
Difficile par ailleurs en cet automne, lorsqu’il est question de prévention, de faire l’impasse sur les récentes évolutions apportées par les ordonnances Macron du 22 septembre 2017. A commencer par la sortie du compte « à points » des quatre critères de pénibilité qui concernent le secteur (manutentions manuelles de charges ; postures pénibles ; vibrations mécaniques ; risque chimique). « Nous le regrettons profondément», appuie Jean-Marc Candille, secrétaire national FNCB-CFDT. «Il faudra dorénavant que le salarié soit usé pour pouvoir bénéficier d’un départ anticipé en retraite. Nous appelons de nos vœux un travail de l’OPPBTP sur ces quatre critères, afin de renforcer la prévention primaire dans ces domaines.»
 
Autre point de vigilance : la fusion des institutions représentatives du personnel. « Seules les entreprises de plus de 300 salariés devront installer une commission « santé, sécurité et conditions de travail » au sein du comité social et économique (CSE) », déplore le responsable syndical. « Quid, dès lors, des entreprises de 50 à 300 salariés ? » Pour Jean-Marc Candille, « la disparition des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) devrait ouvrir un champ d’intervention à l’OPPBTP. Nous souhaitons, pour faire progresser la prévention, que l’organisme de prévention incite les plus petites entreprises à mettre en place ce type de commission ».  
 
 
 
Bientôt une nouvelle convention « santé au travail » dans les TP
 
Jacques Chanut prône en outre une approche pluridisciplinaire en matière de prévention, et le renouvellement de partenariats entre les différents acteurs. Ce que s’apprête à faire la FNTP. « La convention sur la santé au travail que nous avions signée en 2012 avec l’Etat, l’OPPBTP, la Cnams-TS et l’Inrs, arrive à son terme », expose Bruno Cavagné, son président. « Ce texte concernait neuf thèmes : certains ont bien marché, à l’image du « risque chantier », de la sécurité concernant les engins de chantiers. Mais d’autres thèmes, un peu moins, que nous allons remettre au goût du jour. » Dans le collimateur de la FNTP : les troubles musculo-squelettiques (TMS). La fédération souhaite aussi mobiliser davantage la maîtrise d’ouvrage, « premier acteur de la chaîne que nous sommes déjà parvenus à sensibiliser en matière de travail illégal ». Cette nouvelle convention doit être signée le 24 octobre prochain, sous l’égide de la ministre du Travail Muriel Pénicaud.
 
13/10/2017